@CADEMIE
Académismes : Muriel Roland-Darcourt

La dette

     Dans le vaste théâtre politique, au sein de la cacophonie hérétique qui bouleverse ce nouveau monde que la finance déjantée inonde de cet argent factice qui porte à l'ensemble des valeurs un véritable préjudice, le berceau de la culture européenne se meurt. Son peuple, qui nous a appris la démocratie, se demande à quel prix l'Union va vouloir le sauver, écrasé chaque jour un peu plus par la rigueur.

     Combien vaut un pays qui nous a tout donné, à commencer par la chose terrestre la moins dérisoire, celle qui a fait l'humanité : le Savoir ?

     Combien a-t-on payé pour ce que Socrate nous a enseigné, combien de pièces et de billets Hippocrate, Pythagore, Aristote, Archimède et Sophocle nous ont demandé en échange de ce qu'ils ont apporté à nos âmes de grossiers ripailleurs bagarreurs ? Qui aurait oublié d'honorer une dette pour payer l'érudition d'un Platon ?

     La culture aurait-elle un prix que ce serait lui faire injure de ne pas la préserver à tout prix.

     L'argent mène aujourd'hui le monde, chaque chose se monnaye à chaque seconde. Payons alors ce que nous leur devons.

     Notre intelligence d'hommes évolués parce qu'éduqués, que nous ne savons visiblement pas estimer de notre juste raison, a un coût dont nous ne nous sommes jamais acquittés, et il serait peut-être temps de rembourser avant qu'un peuple tout entier ne se taise à jamais, pour une poignée de devises qui n'existent même pas, qui ont pour seule cotation celle qu'on leur a octroyé un jour de déraison.

     Dans cette course folle après l'argent nous oublions l'enseignement des plus grands. Les idées mènent la société bien plus que toute autre valeur, et les laisser crever c'est tuer, pour tous, des lendemains meilleurs.