... Balzac !
Devant la qualité d’écriture des œuvres soumises les jurés du Goncourt ont longtemps hésité entre Balzac, Flaubert et Hugo, louant un cru 2025 exceptionnel. Finalement c’est Balzac qui a remporté la palme pour son roman Le creux de ma vague. Le jeune prodige de quinze ans, qui vient tout juste d’être admis au baccalauréat avec mention « très bien » malgré de lourdes lacunes orthographiques, grammaticales et sémantique, se targue d’avoir pondu son roman de 500 pages en moins de 2 heures, empruntant à son illustre mentor le style d’écriture.
Décidément les auteurs nés de l’Intelligence Artificielle n’ont de cesse de nous surprendre.
On peut comprendre l’embarras des jurés devant la multiplication des « chef d’œuvres » estampillés IA, sous lesquels croulent des éditeurs confus.
Pourtant, les romans concoctés via l’IA sont détectables plus facilement qu’il n'y paraît, au-delà des applications chargées de les débusquer.
Le roman est une merveille de style ? Normal. Le style Balzac, Flaubert, Dumas & co n’a plus à faire ses preuves . Il est creux ? Normal. Il distille la pensée redondante et stéréotypée d’un algorithme qui n’est pas conçu pour la créativité mais pour la reproduction. Il n’a pas d’âme ? Normal. L’IA ne peut comprendre les intentions de l’auteur, les subtilités intuitives, la touche personnelle, l’ironie, en gros l’IA n’a pas le sens de la plaisanterie. Parce qu’une machine n’a pas d’émotion, elle dégurgite ce qu’elle a ingurgité.
Si l’IA peut être un assistant utile à qui sait s’en servir, force est de reconnaître que ses utilisateurs sont nombreux à confondre « assistant » et « remplaçant », et à submerger les éditeurs de ce genre de production. C’est bien écrit. C’est parfait. Si parfait que ça ne respire rien, ne dégage rien, n’apporte rien. Aussi parfait et artificiel qu’une poupée gonflable.
Un livre non produit par l’IA a des faiblesses d’écriture, des erreurs de style, il n’est jamais parfait et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle les éditeurs existent.
Alors, les futurs auteurs seront-ils les promoteurs d’une pensée plate, édulcorée, désengagée, enveloppée dans la soie d’une belle écriture piquée aux écrivains classiques, une pensée formatée à l’algorithme américain ou chinois selon l’IA choisie ?
Dernier point : à qui appartient une œuvre produite par le biais de l’IA ? À son utilisateur ? À l’auteur dont on a pillé le style d’écriture, ou ses ayant-droits ? À l’entité anonyme en charge de gérer l’algorithme qui nourrit l’IA ? On peut s’interroger sur le détenteur des droits d’un livre produit par une IA, via une plateforme à laquelle l’utilisateur doit céder au préalable les données collectées. Si un romancier connu peut contourner la dépossession de son œuvre du fait de sa notoriété, il n’en est rien pour le commun des mortel dont le livre ne sera jamais publié. Et dès lors, on peut aussi concevoir qu’une œuvre produite par l’IA appartienne à l’IA, et que ses concepteurs soient en droit d’exiger les bénéfices d’un éventuel succès.